Présentation du sujet
Les démocraties libérales sont, à notre époque, fondées sur le système représentatif. Ces régimes ont été développés lors de l’instauration progressive des sociétés modernes. Dans ce système le peuple élit périodiquement et directement des représentants afin qu’ils siègent dans des institutions telle que le parlement ou le sénat. Ceux-ci prennent des décisions grâce aux mandats qu’ils tiennent du peuple. Ils ont alors pour principales fonctions d’exprimer la volonté de la Nation à travers les grandes décisions qu’ils auront à prendre. Ils se substituent donc à la société et tentent d’effectuer ce travail en se conformant le plus possible aux orientations pour lesquelles les citoyens les ont élus. Toutefois cette idée de représentation conforme à la volonté des citoyens électeurs est idyllique : dans ces sociétés, à des degrés différents, se constituent et se développent une infinité de groupes et de tendances d’intérêt, à tel point qu’il est difficile d’affirmer que les membres des Assemblées représenteront effectivement la totalité des diversités.
Ce constat est à l’origine d’une «crise » des systèmes représentatifs dans les « vieilles » démocraties. Selon Rosanvallon ce phénomène est intrinsèque au système lui-même. En effet, dans un tel système démocratique le peuple est toujours marqué par une tension interne et apparaît comme séparé de lui-même. L’unité du peuple-nation représenté dans les parlements est abstraite et fictive et donc continuellement contredite par les divisions et les différences qui structurent réellement la société. Ainsi le concept de démocratie représentative se rapproche beaucoup plus d’un idéal théorique que d’une réalité concrète.
Il est vrai que dans nos sociétés les mécanismes démocratiques sont en crise. Les citoyens dénoncent la déformation de la volonté populaire par les gouvernants, en France de récents sondages font apparaître que 82% des citoyens estiment que les politiciens ne s’intéressent pas à leur sort. Que ce soit un fait réel ou un sentiment factice, le malaise politique se traduit par une augmentation constante de l’abstentionnisme lors des votes. Cette crise est elle une crise des partis politiques ou du régime représentatif lui-même ?
La doctrine paraît sur ce point divisée. On constate à la fois une baisse du militantisme et une baisse de confiance des citoyens envers les partis politiques. D’après certains observateurs l’origine de cette crise proviendrait de la transformation de l’état libéral en état providence à la fin du 19eme siècle : les gouvernements sont intervenus dans les domaines économiques, sociaux, culturels bien au delà des fonctions régaliennes de l’état. Son rôle accru a nécessité la recherche de nouvelles sources de légitimation de ses décisions et ceci au moyen de techniques diverses.
La conséquence de cette évolution est l’augmentation sensible des recours aux techniques de démocratie directe et cela surtout depuis la fin des années 60 : sondages, délibérations publiques mais surtout le référendum. Ces techniques apparaissent alors comme le seul moyen de garantir que les décisions politiques soient prises en accord absolu avec la volonté populaire. Mais cela n’a pas suffit a préserver l’intérêt des citoyens pour les votations, intérêt qui apparaît en baisse constante depuis cette époque. La doctrine s‘est attachée à expliquer les tenants et les aboutissants de cette tendance généralisée dans les démocraties libérales sans pour autant aboutir à des conclusions certaines. C’est l’objet de ce mémoire de maîtrise. Dans le cadre de cette étude nous ne parlerons pas des référendums locaux qui, pourtant, ont une place importante dans certains pays par exemple en Suisse où chaque canton est un Etat fédéré. Nous nous en tiendrons donc aux référendums organisés au niveau national en France, Italie et en Suisse.